Mon trésor
My Tresor (Or) - Or

Keren Yedaya
Semaine Internationale de la Critique
Caméra d'Or
Grand Prix de la Semaine de la Critique
Prix SACD
Prix de la toute jeune critique
content


Drame social sur l'existence pitoyable d'une mère et de sa fille, Mon trésor est une œuvre digne dont le synopsis pouvait laisser présager le pire mélo. Echouant à quitter sa misérable existence de prostituée, Ruthie, dont les passes n'ont de succès qu'auprès des clochards du quartier, partage son appartement avec Or, sa fille adolescente qui collectionne les amants d'un soir. Refusant la déchéance de sa mère, la jeune fille tente de la secouer mais reproduit elle-même sa destinée. De petits boulots en activités de call-girl, elle n'échappe pas à sa condition et reprendra la flambeau.
Sans misérabilisme ni exhibitionnisme, la réalisatrice, qui signe son premier film, assume le style naturaliste en montrant le combat, perdu d'avance, de deux femmes qui se débattent dans une société cruelle et hostile. Deux séquences parmi d'autres montrent la malédiction qui semblent peser sur elles : dans la première, Ruthie, qui cherche un nouvel emploi, prépare avec maladresse de la nourriture pour chien devant le regard condescendant d'une maîtresse de maison : gestes dérisoires, qui traduisent l'impossibilité de changement de vie ; dans la seconde, Or apprend qu'elle ne pourra plus revoir son petit ami, la famille de celui-ci la considérant comme non fréquentable.

Ainsi, le regard des autres occasionne un étiquetage et la stigmatisation accélèrera la chute finale. La mise en scène de Keren Yedaya opte pour une démarche modeste et sobre : une caméra stable et un étirement des plans qui permettent aux personnages de s'installer durablement sur l'écran, tout en suggérant la complicité entre les deux héroïnes. Les rapports entre celles-ci évoquent par moments les relations entre Rosetta et sa mère, sans la rudesse des personnages des frères Dardenne.
Si Mon trésor reste en mémoire, ce n'est donc pas par le spectaculaire, le chantage à l'émotion ou l'exercice de style mais par la subtilité de son scénario et l'économie de moyens dans la réalisation. Le film est par ailleurs un témoignage inédit sur une société israélienne à deux vitesses, et la description sans concessions d'un monde urbain réfractaire à la générosité.

Gérard Crespo


1h40 - France - Scénario : Keren Yedaya, Sari Ezouz - Photo : Laurent Brunet - Son : Guy Amita - Montage : Sari Ezouz - Décors : Avi Fahima - Interprétation : Dana Ivgy, Ronit Elkabgetz.

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