Red Road
Andrea Arnold
Sélection officielle
Prix du jury

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Lauréate d’un Oscar du court-métrage, Andrea Arnold  concourait cette année pour la Palme d’or et la Caméra d’or. Se déclarant fidèle au Dogme, elle a brodé une histoire saisissante dont le point de départ lui a été soufflé par le poids croissant du phénomène de vidéosurveillance au Royaume-Uni.
Des airs de Fenêtre sur cour imprègnent Red Road. Jackie est l’employée dont la fonction consiste, derrière des écrans de contrôle, à surveiller les habitants d’un quartier de Glasgow. Un microcosme de la société écossaise défile alors sous ses yeux dans des tranches de vie alliant banalité et insolite : femme de ménage époussetant au rythme d’une musique endiablée, vieillard au petit chien malade, gamine rackettée devant sa cité. Le train-train quotidien est perturbé le jour où Jackie rencontre l’être qui a bouleversé sa vie et duquel elle souhaite se venger. À l’instar de James Stewart dans le film de Hitchcock, elle va vite se trouver dans la double situation de détective et de proie potentielle en jouant avec le feu et dans un sens avec nos nerfs.
Red Road n’est pourtant ni un polar, ni un film social. La misère ambiante et l’existence étriquée que l’on voit sur l’écran et ses écrans (tournées de pub tristounettes, fêtes sinistres, lotissements lugubres) constituent certes un décor assumé mais n’ont pas d’autres attributs que les saloons chez John Ford ou les cafés parisiens chez Claude Sautet.


De même la vie personnelle de Jackie (une belle-famille avec laquelle elle entretient des rapports de circonstance depuis la mort accidentelle de son mari, un vague collègue qui lui sert d’amant furtif) n’est pas un élément de portrait de femme mais une suite d’indices nous permettant de saisir ses motivations. Les plus beaux instants de Red Road sont ces séquences muettes qui voient Jackie se livrer à une maladroite filature et entretenir avec sa cible des rapports ambivalents. Il faut souligner ici le jeu tout en nuances de Kate Dickie, dont c’est le premier rôle au cinéma et qui exprime à merveille la détermination et la souffrance d’une femme qui n’a plus rien à perdre.
On attend avec intérêt le second long métrage d’Andrea Arnold et les autres œuvres du projet Advance Party qui implique l’écriture de trois films par trois réalisateurs avec l’utilisation des neuf mêmes personnages.

Gérard Crespo


1h53 - G.-B. - Scénario, dialogues : Andrea Arnold - Photo : Robbie Ryan - Décors : Helen Scott - Montage : Nicolas Chaudeurge - Interprétation : Kate Dickie, Tony Curran, Martin Compston, Natalie Press.

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