Canine
Dogtooth - Kynodontas
de Giorgos Lanthimos
Sélection officielle
Un certain regard

Prix Un certain regard
palme

Sortie en salle : 02 décembre 2009




Hard et essai

Le père, la mère et leurs trois enfants vivent dans les faubourgs d'une ville. Leur maison est bordée d'une haute clôture ; les enfants ne l'ont jamais franchie. Leur éducation, leurs loisirs, leurs amusements, leur ennui, leur entraînement physique se conforment au modèle imposé par les parents, en l'absence de toute empreinte du monde extérieur. Les enfants pensent que les avions qui volent au-dessus de la maison sont des jouets et les zombies, des petites fleurs jaunes. Une seule personne a le droit de s'introduire chez eux : Christina, qui travaille comme agent de sécurité dans l'usine du père. C'est pour satisfaire les pulsions sexuelles du fils que le père la fait venir. Dans la famille, tout le monde l'adore, l'aînée des filles surtout. Un jour, Christina lui offre un serre-tête qui scintille, s'attendant à recevoir quelque chose en retour...

Bravo au jury d' « Un Certain Regard  » pour avoir distingué cette œuvre sulfureuse non consensuelle, si peu représentative du film « de festival ». D'aucuns ont reproché au cinéaste de se complaire dans une esthétique précieuse, pastiche du Pasolini de Théorème et plagiat inavoué des univers de Haneke, Buñuel, ou Ulrich Seidl. Parions que l'originalité de Canine en a en fait déconcerté plus d'un, le cinéaste n'hésitant pas à se nourrir de ces références pour proposer un film somme toute filmiquement non identifiable.

Si l'employée qui séduit tous les enfants de la maisonnée s'apparente à l'ange/démon Terence Stamp, si les figures parentales s'avèrent plus effrayantes que Fernando Rey dans Viridiana ou Annie Girardot dans La Pianiste, si certains passages cauchemardesques (le massacre du chat, l'automutilation dentaire) semblent hésiter entre la réalité et le fantasme (à l'instar des songeries de Belle de Jour), le style de Yorgos Lanthimos est bien présent, par ce mélange d'humour pince-sans-rire, de sobriété dans la provocation et d'ellipse narrative. Le rapprochement avec Seidl est plus intéressant, la sexualité sans érotisme des personnages de Canines rejoignant les mondes glauques de Dog Days et Import/Export. On appréciera le parallèle symbolique entre les dépendances familiales et l'aliénation des systèmes totalitaires, ainsi qu'un dénouement ouvert sujet à multiples interprétations. Canine confirme en outre les espoirs que l'on pourrait placer dans un cinéma grec dont on entend peu parler hormis les films du vétéran Angelopoulos.

Gérard Crespo


2h10 - Grèce - Scénario : Efthymis FILIPPOU, Giorgos LANTHIMOS - Interprétation : Anna KALAITZIDOU, Mary TSONI, Michelle VALLEY Aggeliki PAPOULIA, Hristos PASSALIS.

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