Mud
Sur les rives du Mississipi
de Jeff Nichols
Sélection officielle
En compétition



Sortie en salle : 1er mai 2013




Tu as fait de moi un voleur

D’une grande sensibilité, Mud fut de loin la meilleure œuvre représentant la délégation américaine de ce Festival. Jeune cinéaste doué, Jeff Nichols avait été révélé à Cannes par Take Shelter présenté l’an dernier à la Semaine de la critique, deuxième film seulement après Shotgun stories.

Son troisième opus traite de l’amitié, un joli thème, entre un jeune garçon qui l’offrira sans réserve et un homme à qui il faudra l’extorquer.

Deux gamins s’embarquent sur le Mississippi, Arkansas pour rejoindre une île inhabitée plantée au milieu du fleuve, s’enfoncent dans la végétation jusqu’à un grand arbre entre les branches duquel est posé un petit cabine cruiser, qu’ils semblent considérer comme leur butin, inquiets toutefois des traces de vie qu’ils trouvent à bord. De retour sur la plage, ils découvrent un homme encore assez jeune, baraqué, buriné, cabossé, déguenillé, édenté, tatoué… inquiétant. « Ellis » « Neck » « Mud », passé les présentations, le dénommé Mud leur fait comprendre gentiment mais fermement qu’ils n’auront leur bateau que s’ils le ravitaillent le temps de survivre quelques jours.

L’histoire s’élargit un premier temps sur les deux familles des adolescents : Ellis vit avec ses parents dans une cabane sur pilotis au bord du fleuve, avec la pêche comme gagne-pain ; sur le pilotis d’en face, habite Mr. Blankenship (troublant Sam Shepard, taciturne mais qui n’en pense pas moins et efficace) ; Neck est élevé par son oncle Galen dans la petite ville attenante.

Au fur et à mesure des exigences de Mud vis-à-vis des deux garçons, auxquelles répondent l’attirance d’Ellis et la réticence de Neck, le focus se fait sur le quotidien d’Ellis : tensions entre ses parents, décision de sa mère de quitter le fleuve qui entraînera la destruction de sa maison, émoi amoureux, auquel s’ajoute à présent les manipulations et le jeu dangereux que Mud lui impose. Jeu dans lequel fait irruption la belle Jupiner, que Mud attend pour qu’ils partent ensemble.

Qu’il s’agisse de cette fille mystérieuse qui le déroute, de May Pearl qui ne le prend pas au sérieux ou de sa mère dont il ne comprend pas la décision, Ellis expérimente la femme et ses pièges sous ses divers aspects, tous plus déconcertants que les autres, que son père résume très simplement et justement par la formule « Les femmes, c’est du boulot. »

Quant à la fraternité et la tendresse qu’espère Ellis de la part de Mud, il lui faudra aller les chercher bien loin derrière les blessures et les accrocs que la vie a infligés à l’aventurier. Comme un défi aux échecs qu’il voit proliférer autour de lui.

Le fleuve et tout l’imaginaire qu’il évoque, les scènes de vie sur ses rives et sur ses eaux, les ciels magnifiques qui l’embrasent donnent à Jeff Nichols matière à confirmer la qualité de réalisation que Take Shelter avait révélée. Matthew McConaughey, qui était également le Ward Jansen de Paperboy, et Reese Witherspoon en Juniper donnent au jeune et prometteur Tye Sheridan une jolie chance d’exceller dans la cour des grands.

Marie-Jo Astic


 

 

 


2h15 - Etats-Unis - Scénario : Jeff NICHOLS - Interprétation : Matthew McCONAUGHEY, Reese WITHERSPOON, Sam SHEPARD, Joe Don BAKER.

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