White God
Feher isten
de Kornel Mudruczo
Sélection officielle
Un Certain Regard

Prix Un Certain Regard


Sortie en salle : 3 décembre 2014




« l’armée des chiens »

Un conte visionnaire entre une espèce supérieure et ses congénères en disgrâce… Une nouvelle loi impose une lourde taxe sur les races croisées. Les refuges sont vite bondés par des bâtards abandonnés. Lili, 13 ans, protège son chien, Hagen, mais son père le relâche dans les rues. Hagen et sa maîtresse cherchent désespérément à se retrouver. Se battant pour survivre, Hagen comprend vite que tout le monde n’est pas le meilleur ami du chien. Il rejoint une bande de chiens errants, puis est capturé...

Sixième long métrage de Kornel Mundruczó (Delta, The Frankenstein Project), White God a séduit les festivaliers mais aussi le jury de la section Un Certain Regard qui lui a décerné son principal prix. Le metteur en scène hongrois livre une fable remarquable sur l’exclusion, la trahison, mettant en scène des chiens (et c’est là sa première réussite : tourner avec 250 chiens !) qui sont tour à tour abandonnés, traqués, parqués puis tués, avant de se révolter. Toute ressemblance avec la situation subie par certaines catégories de nos populations n’est pas purement fortuite ! Dans les différents entretiens qu’il a donnés à Cannes, le réalisateur ne s’en cache pas : son film est « grandement inspiré par les rapports sociaux invraisemblables et de plus en plus hostiles de nos jours. » On peut donc tout à fait identifier, derrière chaque chien rejeté, un marginal, l’Autre, celui que l’on n’accepte pas (ou plus). Et, même si le film ne le précise pas, la référence à la situation politique en Hongrie (la forte percée de l’extrême-droite) est assez explicite.

Filmé caméra à l’épaule, au plus près de ses personnages, White God suit le parcours de Hagen, sa métamorphose au contact des humains entre les mains desquels il tombe et sa révolte contre ceux qu’il considérait pourtant comme ses maîtres, ses dieux (d’où le titre). Il faut saluer ici le travail des dresseurs, notamment à propos de Hagen. Lili, sa maîtresse, bénéficie aussi de toute l’attention du cinéaste : honnête et courageuse, elle est celle qui refuse de rentrer dans le rang, celle qui contredit les adultes, celle aussi qui perd d’une certaine manière son innocence.

Le film utilise plusieurs éléments de style et mélange (réinterprète même) les codes du mélodrame, du film d’aventure (par exemple, une musique très présente) et du film de vengeance. Là réside également la grande réussite de ce film : les ruptures de ton, le changement brutal d’une scène à l’autre, pour au final, basculer dans l’horreur et le gore. Certaines scènes sont incroyables : les premiers plans, montrant des carcasses de viandes bovines dépecées et découpées dans un abattoir, ou celles de « l’armée des chiens » envahissant les rues de la ville, déversant leur colère dans des attaques fulgurantes.

En somme, un film fort et moraliste, une parabole intelligente sur les minorités et le sort qu’on leur réserve, très bien interprété et mis en images.

Xavier Affre


 

 


1h47 - Hongrie, Allemagne, Suède - Scénario : Komel MUNDRUCZO, Viktoria PETRANYI, Kata WEBER - Interprétation : Zsofia PSOTTA, Tamas POLGAR, Orsolya TOTH.

ACCUEIL

RETOUR A LA LISTE DES FILMS