Le BGG - Le Bon Gros Géant
The BFG
de Steven Spielberg
Sélection officielle
Hors compétition







Au pays des schnockombres et de la frambouille

Produit par Disney, Le BGG est tiré d'un roman de Roald Dahl. L'adaptation a été confiée à Melissa Mathison, la fidèle scénariste de Spielberg (E.T.), récemment disparue. Le film marque le retour du cinéaste au conte pour enfants. Sophie, une petite orpheline solitaire de Londres, est un soir enlevée par un Géant qui l'emmène dans sa grotte. Elle réalise très vite que le Bon Gros Géant ne mesure « que » sept mètres de haut et n'est pas dangereux, comparé à ses pairs qui l'humilient et le harcèlent. Le BGG va même jusqu'à protéger la fillette d'êtres malveillants tels le Buveur de sang et l'Avaleur de chair. Sophie est aussi invitée par son nouvel ami au Pays des Rêves, dont il va lui révéler les mystères... Tous les ans, le Festival de Cannes propose, hors compétition, un blockbuster familial qui sortira pendant la période estivale. Après Le Petit Prince l'an passé, c'est le nouvel opus de l'auteur de Rencontres du troisième type qui tient cette fonction. Le résultat est inégal. Le BGG est un agréable spectacle qui devrait ravir le jeune public et brille par son savoir-faire technique, ce qui est le minimum syndical attendu de Spielberg : comme dans Jurassic Park, les procédés utilisés pour crédibiliser l'irruption du surnaturel dans le quotidien sont remarquables, et l'usage du numérique pour « maquiller » certains personnages fait écho aux techniques qui transformaient les acteurs de Tintin en figures de cartoons. La musique de l'inévitable John Williams, plus sobre qu'à son habitude, distille une émotion qui tente d'éviter la guimauve, et le reste de l'équipe artistique et technique effectue un vrai travail de pro.

On citera en particulier la photo de Janusz Kaminski (Il faut sauver le soldat Ryan), d'une réelle beauté lorsque la caméra se déplace dans un Londres nocturne et presque désert. L'humour sauve certains passages de la grandiloquence ou de la mièvrerie, et l'on appréciera une désopilante visite chez la reine d'Angleterre (Penelope Wilton). Quant à la thématique, elle est fidèle à l'univers du cinéaste, des frustrations de l'abandon familial (Empire du soleil) à la puissance des idéaux et du rêve (Lincoln). Par contre, l'œuvre souffre d'un cruel manque de rythme, est desservie par le cabotinage de Mark Rylance (l'horripilante voix française de Dany Boon n'arrange rien), abuse des jeux de langage (le BGG semble nécessiter des soins orthophoniques), et adopte un ton consensuel trop sage. Spielberg ne serait-il pas en fin de compte dépassé sur son propre terrain eu égard à la réussite de récents films oniriques pour enfants de la trempe de Vice-versa ? Partagé entre des divertissements et un cinéma « adulte », Spielberg a donné le meilleur de lui-même dans les deux tendances (Les Dents de la mer vaut l'excellent Le Pont des espions), mais s'est aussi cassé les dents avec Indiana Jones et le royaume du crâne de cristal ou Cheval de guerre. Le BGG est dans une ligne médiane : une œuvre estimable mais somme toute mineure dans la filmographie du réalisateur.

Gérard Crespo


1h55 - États-Unis - Scénario : Melissa MATHISON, d'après le roman de Roald Dahl - Interprétation : Ruby BARNHILL (VF : Jaynella COADOUR), Mark RYLANCE (VF : Dany BOON), Rebecca HALL (VF : Laetitia CORYN), Penelope WILTON (VF : Tania TORRENS), Jemaine CLEMENT (VF : Paul BORNE).

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