O Grande Circo Mistico
O Grande Circo Místico
de Carlos Diegues
Sélection officielle
Hors compétition
Séance spéciale








Trahisons et désillusions

Carlos Diegues est un réalisateur brésilien important qui n’a pas toujours la place qu’il mérite dans les annales du cinéma, comparativement à Glauber Rocha ou Nelson Pereira dos Santos qui comme lui ont fait partie des fondateurs du « Cinema Novo » dans les années 60. Ses deux films les plus connus, Xica da Silva (1976) et Bye Bye Brésil (1980) dénotaient un sens artistique aigu tout autant qu’une volonté de s’ancrer dans un cinéma populaire accessible à tous. C’est également le cas de ce Grand cirque mystique injustement passé inaperçu en séance spéciale du dernier Festival de Cannes. L’œuvre est adaptée d’un poème de Jorge de Lima, auteur surréaliste emblématique de la tradition baroque brésilienne. Loin de l’esprit trivialement chronologique des feuilletons télévisés relatant des démêlés familiaux sur plusieurs générations, Le Grand cirque mystique adopte une narration décalée s’autorisant d’audacieuses ellipses et des ruptures de ton jouissives : le mélodrame, la comédie musicale ou la tragédie sont ainsi mobilisés dans un récit foisonnant qui aborde intelligemment des thèmes maintes fois traités à l’écran (l’adultère, la trahison, les difficultés financières) ou constituant souvent un tabou filmique, comme l’inceste ou les troubles de la gémellité.


Les scènes de cirque sont fascinantes. Certes, elles n’atteignent pas la grandeur formelle des Clowns de Fellini et encore moins du sublime Lola Montès de Max Ophuls, mais Carlos Diegues y témoigne d’une maîtrise incontestable. Imprégné de réalisme magique, ce récit de l’apogée et de la décadence d’un cirque est aussi une métaphore à plusieurs niveaux : du cinéma, de certains aspects des traditions brésiliennes, ou du monde de l’art en général. Carlos Diegues ne tombe pourtant pas dans le sentimentalisme nostalgique d’un Ettore Scola dans Splendor ou de Giuseppe Tornatore dans Cinéma Paradiso : son film est avant tout celui d’un grand visionnaire qui semble encore croire aux possibilités de renaissance d’un art en déclin. Quelque part entre les univers de Pierre Etaix et Jodorowsky, Le Grand cirque mystique est donc une œuvre attachante et ambitieuse. Si les interprètes brésiliens et portugais (tous brillants) restent inconnus chez nous, c’est une surprise de croiser dans le casting de cette coproduction les Français Vincent Cassel et Catherine Mouchet, dans des rôles très éloignés de leurs habituelles compositions.

Gérard Crespo



 

 


1h34 - Brésil, Portugal, France - Scénario : Carlos DIEGUES, Georges MOURA, d'après le poème de Jorge de LIMA - Interprétation : Mariana XIMENES, Jesuita BARBOSA, Vincent CASSEL, Catherine MOUCHET, Bruna LINZMEYER, Juliano CAZARRÉ.

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