Les Corps ouverts
de Sébastien Lifshitz
avec Yasmine Balmadi, Pierre-
Loup Rajot, Margot Abascal...
Cinémas en France
 

47 minutes de réalisme poétique
Prix Jean Vigo 1998, Les Corps ouverts est un moyen-métrage plutôt fascinant sur un sujet assez banal a priori et maintes fois traité dans le cinéma français. Rémi, lycéen beur (Yasmine Belmadi, étonnant), partage son temps entre les études qui l'ennuient, sa famille, et l'épicerie où il travaille le soir. Son existence monotone sera perturbée par la rencontre avec un réalisateur charmé par son jeu autant que par son physique. Ce sera le début d'une série de rencontres sexuelles, filles et garçons confondus, et d'une errance révélatrice de son mal de vivre.
L'œuvre a le mérite d'éviter la lourdeur psychologique et sociologique qu'un tel scénario pouvait laisser présager. Les personnages ne tiennent aucun discours et le contexte social n'est pas prétexte à une démarche démonstratrice. De même, le cinéaste ne porte pas de jugement moral et nous épargne les excès mélodramatiques que certains aspects du scénario (comme la maladie du père) auraient pu engendrer. En fait, ces 47 minutes parviennent à trouver un bel équilibre : d'une part, un style documentaire montre le réel à l'état brut (scènes au lycée, audition), mais aussi la

force des désirs. D'autre part, quelques envolées lyriques et romanesques viennent tempérer la sécheresse d'un certain naturalisme. Au carrefour de plusieurs influences (le Truffaut des 400 coups mais aussi Pialat pour la sincérité et le dépouillement), Les Corps ouverts échappe au nombrilisme et montre aussi que le réalisme poétique a encore de beaux jours dans le cinéma français. A ce titre, il ne démérite pas du prestigieux prix qu'il vient d'obtenir.

Gérard Crespo


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