Dias de gracia
Jours de grâce
de Everardo Gout
Sélection officielle
Hors compétition
Séance de minuit



Sortie en salle : 13 juin 2012




Et un, et deux, et trois...

Ce premier film mexicain se veut d'emblée marqué du fer du cinéma coup de poing, par cette première séquence montrant un policier violent humiliant deux jeunes enfants dont on comprend qu'ils sont mêlés à un trafic de drogue. L'un de ces gosses terrifiés, Doroteo, deviendra dealer confirmé puis membre d'un gang de preneurs d'otages dans les années à venir. Le flic agressif apparaît à la bobine suivante dans le rôle d'un jeune papa découvrant sa progéniture en couveuse et plus tard comme ripoux maillon d'un réseau mafieux tentaculaire... L'œuvre arbore la structure du film choral structuré en trois périodes (2002, 2006 et 2010) qui se téléscopent, certains personnages étant au centre du dispositif narratif à chaque date. Trois coupes du mondes de football servent de « McGuffin » à des histoires policières liées chacune à une prise d'otage. Le cinéaste s'inspire manifestement de La cité de Dieu pour le thème de l'enfant pris dans l'engrenage de l'horreur mais on songe plutôt à Ajami pour ce montage speed et cette mise en abyme consistant à interpréter des scènes rétrospectivement, compte tenu des flash-back ou d'un détail à venir dans le récit. Sur le fond et la forme, il est surprenant de trouver des similitudes avec Miss Bala, autre polar mexicain de la sélection officielle présenté en 2011 et souhaitant dénoncer lui aussi la décadence d'une société gangrenée par la corruption.

La comparaison n'est pas toujours en faveur de ce Jour de grâce, dont la confusion du scénario sera plus ou moins éclairée en fonction du degré de culture footballistique du spectateur : pour peu que l'on ait compris que le Sénégal ait battu la France quatre ans après la victoire des « Blacks, blancs, beurs » ou que ces « putains de Brésiliens » sont encore arrivés en finale la même année, on ne sera pas surpris de voir que l'otage que l'on croyait être libéré est toujours détenu par ses ravisseurs, pour la simple raison que ce n'est pas le bon personnage et la bonne année de l'histoire. Dias de gracia se veut virtuose mais le réalisateur se prend les pieds dans les les fils du récit et abuse des effets tape-à-l'œil, dont ces ralentis esthétisants, cette musique tonitruante, cette violence gratuite déployée dans trop de films pour constituer désormais un élément de subversion. Entre deux « cabron » rythmant des dialogues convenus, l'auteur ne nous épargne ni le petit doigt coupé et envoyé par la voie postale à la famille, ni les larmes d'effroi filmées en gros plan, ni la tentative de rédemption du jeune criminel entraîné dans la spirale de la déviance mais dont la passion pour le foot sera indirectement source de prise de conscience morale... Le film est donc à la fois trop malin et prévisible pour emporter véritablement l'adhésion.

Gérard Crespo


2h13 - Mexique - Scénario : Everardo GOUT, David RUTSALA - Interprétation : Eva LONGORIA, Carlos BARDEM, Paulina GAITAN.

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